GOTOIoT : des étiquettes connectées pour les résidents en EHPAD

Au sein des établissements médicalisés, les personnes âgées atteintes de troubles cognitifs perdent fréquemment leurs repères et le chemin de leur chambre. Pour veiller à leur sécurité et aider le personnel soignant, la start-up GOTOIoT, incubée à Télécom Paris et présente à VivaTech 2023, développe des étiquettes RFID capables de les guider et d’envoyer une alerte en cas de danger.

La problématique du bien vieillir figure aujourd’hui parmi les priorités de nombreux pays. Le gouvernement français a ainsi lancé un programme « pour que toutes les personnes puissent vivre au mieux le grand âge », à domicile comme en établissement spécialisé. De façon générale, les acteurs de la silver économie — l’économie des séniors — entendent répondre aux difficultés rencontrées par les personnes âgées, à commencer par la perte d’autonomie.

En effet, lorsque survient un trouble cognitif, tel que la maladie d’Alzheimer, il est souvent compliqué de continuer à vivre seul chez soi. Des structures médicalisées, comme les EHPAD, proposent alors un hébergement et un accompagnement aux personnes âgées dépendantes. Et pour accueillir au mieux leurs patients atteints de troubles cognitifs, ces établissements disposent généralement de services spécialisés : les unités de vie protégée (UVP), qui doivent répondre à des besoins spécifiques.

Concilier sécurité et liberté

« Les EHPAD doivent régulièrement gérer le cas de résidents qui errent dans les couloirs et se trompent de chambre », indique Sophie Tron, présidente et fondatrice de la start-up GOTOIoT, actuellement incubée par Télécom Paris. « Une telle situation se produit particulièrement la nuit, alors que le personnel de l’établissement est en nombre restreint, engendrant une grande confusion. » Et le danger associé à ces errances nocturnes peut s’avérer plus grand, avec un risque élevé de chute lorsque que le patient emprunte des escaliers ou sort de la résidence.

De nombreux EHPAD cherchent donc une solution permettant d’assurer la sécurité des résidents, sans surmener le personnel, « pour qui la surveillance représente plus de 80 % de l’activité », d’après l’enquête nationale sur les UHR de l’ANESM 2016. Cependant, les établissements ne souhaitent pas non plus priver les personnes âgées dépendantes de leur liberté d’aller et venir (conformément au code de l’action sociale et des familles, article L 311-4-1 du 28 décembre 2015). Un enjeu majeur, d’autant que cette population fragile nécessite des précautions particulières. « En nous rendant sur le terrain, nous avons constaté que ces résidents ne toléraient pas le port d’un accessoire, tel qu’un bracelet ou un médaillon », note Sophie Tron. « Il fallait donc trouver un dispositif capable de les protéger sans les gêner. »

Une étiquette pour guider et alerter

Ainsi, GOTOIoT a développé une solution reposant sur des étiquettes connectées, ajoutées à tous les vêtements des pensionnaires. De cette façon, quand le résident erre dans le couloir, il ne peut ouvrir que la porte de sa chambre, les autres restant verrouillées. En outre, l’outil est capable de guider l’individu semblant égaré, via un spot lumineux éclairant la porte de sa chambre.

« Néanmoins, en travaillant avec la psychologue d’un EHPAD, nous avons compris que, dans un tel cas, le résident cherchait probablement quelque chose et qu’il risquait donc de ressortir de sa chambre si on l’y raccompagnait », affirme la présidente de la start-up. « Par conséquent, notre guide lumineux va aussi éclairer une zone au bout du couloir : le living-room. » Un lieu familier et rassurant pour le patient, qui y trouvera une bibliothèque, un aquarium, ou encore une télévision.

L’étiquette de GOTOIoT permet également d’améliorer la sécurité des pensionnaires. En effet, lorsqu’un résident se retrouve dans une cage d’escaliers ou en dehors de l’établissement, une alerte est automatiquement envoyée au personnel de l’EHPAD, qui peut intervenir au plus vite en cas de danger.

Optimiser l’entretien du linge

Comment les étiquettes sont-elles ajoutées aux vêtements des résidents ? « Nous nous intégrons dans le processus d’accueil des EHPAD, afin de faciliter le travail des équipes », explique Sophie Tron. « Lorsqu’un nouveau résident arrive, il doit fournir son trousseau de linge, pour qu’il soit marqué à son nom. C’est à ce moment que le personnel de blanchisserie ajoute notre solution. » Il utilise alors une thermocolleuse, afin de coller les étiquettes sur les vêtements, et attribue celles-ci au nouvel arrivant, via un logiciel de gestion.

L’équipe chargée de l’entretien du linge joue donc un rôle prépondérant dans le déploiement de la solution GOTOIoT. Mais elle en tire également parti. En effet, à la réception des sacs de linge sale, le personnel peut les scanner et obtenir rapidement leur composition, ce qui leur permet d’optimiser l’entretien en conséquence. Et une fois les vêtements lavés et pliés, l’équipe du service de blanchisserie peut de nouveau les scanner, afin d’allumer le casier de leur propriétaire et de les ranger au bon endroit. Un moyen de gagner du temps, d’éviter les erreurs, ou encore de repérer rapidement un vêtement égaré.

De la RFID aux étiquettes augmentées

Techniquement, comment fonctionne la solution GOTOIoT ? « Chaque porte est munie d’une gâche électrique, qui se déverrouille à l’approche du résident de la chambre. Il n’y a plus d’erreur de chambre possible ! », décrit Sophie Tron. « Cette information lui est communiquée par une antenne, située dans le couloir, et un système logiciel qui gère les droits d’accès. » Ce système repose sur la technologie RFID UHF (Ultra Haute Fréquence), très employée au sein de la grande distribution, pour la gestion des magasins ou des entrepôts. L’UHF offre en effet une portée allant jusqu’à une dizaine de mètres, contrairement à la RFID ordinaire, permettant ainsi le déverrouillage à distance.

Aujourd’hui, la solution est déployée au sein d’un premier établissement en Auvergne-Rhône-Alpes, en réponse à un appel d’offres. Et GOTOIoT poursuit son développement commercial dans cette région, appuyée par l’ARS (Agence Régionale de Santé) et le conseil départemental de l’Isère, qui ont validé l’installation et soutenu financièrement l’innovation. Des contacts ont également été pris en Île-de-France. En parallèle, l’entreprise a amorcé une levée de fonds, qui devrait aboutir dans les prochains mois.

Par ailleurs, la start-up travaille déjà sur le futur de sa solution, en collaboration avec le CNRS : l’étiquette augmentée. « Nous intégrons à nos étiquettes passives des capteurs : de température, de pression, d’humidité, ou encore de choc », annonce la fondatrice de GOTOIoT. « Le but : identifier des signaux d’alerte et prévenir le personnel. Par exemple, un dépassement de température chez un résident alertera les soignants. » Des premiers prototypes ont été testés et l’entreprise recherche des établissements médicalisés pour mettre en place des projets pilotes intégrant ce service innovant de prévention.

La start-up entrerait alors dans un nouvel univers. « Les informations recueillies par les capteurs pourraient être assimilées à des données de santé », avance Sophie Tron. « Cela nous imposerait d’obtenir la certification de dispositif médical pour notre solution. » Une contrainte anticipée par l’entreprise, qui a commencé à travailler sur ces démarches, tout en poursuivant son développement, grâce au recrutement d’un data scientist.

Par Bastien Contreras.

GOTOIoT à VivaTech 2023

La start-up GOTOIoT, incubée à Télécom Paris, participera au salon VivaTech 2023 qui se tiendra à Paris du 14 au 17 juin prochain. La jeune entreprise sera présente le mercredi 14 juin sur le stand L18 de l’Institut Mines-Télécom.

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