Des cartes pour la gestion de crise du Covid-19

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Capture d'écran des cartes du Tarn pour visualiser l'épidémie de Covid-19

La préfecture du Tarn a travaillé avec une équipe de recherche d’IMT Mines Albi pour répondre aux besoins du département dans la gestion de la crise liée au Covid-19. Frédérick Benaben, chercheur en génie industriel, nous explique l’outil qu’ils ont développé pour aider les acteurs locaux à visualiser les informations nécessaires, et faciliter leurs prises de décision.

 

« La crise liée au Covid-19 est originale, nouvelle, car c’est surtout une crise d’information » annonce Frédérick Benaben, chercheur à IMT Mines Albi en interopérabilité des systèmes d’information. Habituellement, la gestion de crise implique une organisation complexe pour faire collaborer les différents acteurs. Avec cette crise sanitaire, ce n’est pas le cas. La difficulté est informative : il faut savoir qui est malade, où sont les malades et où sont les ressources. Les outils algorithmiques de gestion de crise sur lesquels l’équipe de Frédérick Benaben travaille se retrouvent alors incompatibles avec les besoins actuels.

« Lorsque nous avons été contactés par la préfecture du Tarn pour leur fournir un outil de gestion de crise, il a fallu presque repartir de zéro » déclare le chercheur. Cette crise n’est pas si complexe dans sa gestion pour qu’elle nécessite l’aide d’intelligence artificielle, mais elle est d’une telle dimension qu’il est difficile de visualiser l’ensemble des informations. Les chercheurs ont donc travaillé à la mise en place d’un outil qui assure à la fois la visualisation démographique du territoire, et l’optimisation du parcours des volontaires.

L’équipe tarnaise a pu mettre à disposition cet outil rapidement et offrir ainsi un gain de temps considérable aux acteurs du territoire. La réussite de ce projet vient aussi de la cohésion au niveau du territoire d’un établissement de recherche et des acteurs locaux pour réagir au plus vite et au mieux à une crise inédite. La préfecture souhaitait travailler sur des cartes pour visualiser les besoins et les ressources du département. C’est ce que Frédérick Benaben et ses collègues, Aurélie Montarnal, Julien Lesbegueries et Guillaume Martin leur ont fourni.

Visualiser le département

La première nécessité est de pouvoir visualiser à l’échelle départementale les besoins des communes. Il faut alors identifier les personnes les plus à risques d’être touchées par la maladie. Les chercheurs ont puisé dans les données publiques de l’Insee pour regrouper des informations, tels que l’âge ou la densité de population. « Le but est de décomposer le territoire en communes et cantons pour diagnostiquer la fragilité à une échelle locale » précise Frédérick Benaben. Il y aura par exemple plus de risques pour une commune dont les résidents ont majoritairement plus de 65 ans.

Les chercheurs proposent donc une carte du département avec plusieurs couches que l’on peut cocher pour visualiser les différentes informations. Une montrant la fragilité des communes, une autre indiquant la capacité de résilience du territoire — basée par exemple sur le nombre de volontaires. En s’identifiant sur le site de la préfecture, ces personnes se portent bénévoles pour aller faire des courses pour d’autres, ou simplement garder le contact ou vérifier que des résidents se portent bien. « Nous pouvons alors voir à l’échelle d’une commune la relation entre le nombre de personnes à risques et celles volontaires, pour voir si la commune a suffisamment de ressources pour réagir » annonce le chercheur tarnais.

Certaines villes avec beaucoup de volontaires apparaissent très vertes, celles où l’on ressent un manque de volontaires très rouges. « Cela nous donne une sorte de pavage du Tarn avec des carreaux rouges et verts, le but étant d’en faire ressortir une couleur unie en associant le surplus de bénévoles aux communes qui en ont besoin » précise Frédérick Benaben.

Cet outil de visualisation du territoire offre un regard simple et clair aux acteurs locaux pour diagnostiquer les besoins des communes. Avec ces informations en main il leur est plus facile de prendre des décisions pour se préparer ou réagir. « Si un territoire est dans le rouge on sait que la situation sera difficile lorsque la vague va passer » résume le chercheur. La préfecture peut alors mobiliser des ressources pour un de ces territoires, en réquisitionnant des locaux par exemple s’il manque un centre de secours à proximité. Il peut aussi s’agir de décisions relatives à la communication, comme un appel à volontaires.

Optimiser les parcours

Cette carte dynamique se met à jour continuellement avec de nouvelles données, comme l’inscription d’un nouveau bénévole. « Il y a un aspect très contemplatif et un autre plus dynamique qui optimise le parcours de ces volontaires » indique Frédérick Benaben. Beaucoup de paramètres sont à prendre en compte pour décider des trajets et cela peut s’avérer être un véritable casse-tête pour les employés de la préfecture. De plus, ces parcours de volontaires doivent aussi être pensés pour limiter la propagation de l’épidémie.

Il faut associer les besoins des personnes malades ou à risque avec les compétences des volontaires. Certains résidents demandent de l’aide aux courses ou pour du jardinage, mais d’autres ont aussi besoin de soins médicaux ou d’aide à la toilette qui nécessitent un savoir-faire particulier. Il faut aussi prendre en compte la capacité de déplacement des volontaires, s’ils sont véhiculés, à vélo ou à pied. Vis-à-vis du Covid-19, il est aussi essentiel de limiter les contacts et réduire le périmètre des trajets au maximum.

« Avec ces informations, nous pouvons développer un algorithme d’optimisation pour proposer les meilleurs parcours pour chaque volontaire » révèle le chercheur. Ce sont bien sûr des données personnelles auxquelles les chercheurs n’ont pas accès. Ils ont testé l’algorithme avec des valeurs fictives pour assurer la fonctionnalité lorsque la préfecture rentrera les données réelles.

« L’intérêt de cette vision cartographique ce sont les possibilités d’évolution » signale Frédérick Benaben. En fonction des données disponibles, de nouvelles couches de visualisation peuvent être ajoutées. « Actuellement nous n’avons pas ou peu de données sur les personnes contaminées ou celles à risque de contamination dangereuse maintenues à domicile. Si nous avions ces données nous pourrions ajouter une nouvelle couche de visualisation et apporter une aide supplémentaire à la prise de décision ». Il est possible de configurer autant de couches de visualisations que souhaité.

Tiphaine Claveau pour I’MTech

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