Images de science : d’où viennent les orgues basaltiques ?
Bernard Guy, Mines Saint-Étienne – Institut Mines-Télécom
Cette photographie montre des orgues basaltiques. On peut en trouver partout dans le monde, là où des coulées de magma émises par des volcans se sont solidifiées et refroidies. Ces structures spectaculaires et fascinantes ont fait, et continuent de faire, l’objet de nombreux travaux, tant de caractérisation sur le terrain et au laboratoire, que de modélisation à caractère physico-chimique et mathématique.
Un exemple très connu est celui de la Chaussée des Géants en Irlande. À cet endroit, comme ailleurs également, on peut voir les colonnes des orgues, mais aussi la structure en coupe, et donc l’intérieur de chaque colonne hexagonale de basalte. Ceci permet de mieux comprendre comment ces magnifiques structures se forment.
En effet, l’explication la plus courante de la formation des orgues basaltiques est celle de la « contraction thermique ». Lorsque le basalte remonte depuis les profondeurs de la croûte terrestre, la masse solide refroidit : elle est encore chaude, pas encore structurée mais déjà solidifiée. Alors, la matière se contracte et des fractures de retrait apparaissent et forment les contours rectilignes des différents hexagones. L’analogie mise en avant est celle de la boue séchée qui se rétracte et fait apparaître des pavages de polygones. Les orgues poussent perpendiculairement aux bords des coulées de lave, et parallèlement aux gradients thermiques.
Mais cette explication ne suffit pas pour toutes les observations : dans la section des colonnes hexagonales, on voit parfois un dessin circulaire. Des structures radiées à partir du centre peuvent aussi se rencontrer, respectant également une symétrie cylindrique.
Quand les structures à petite échelle permettent de comprendre celles à grande échelle
Comment expliquer ces structures circulaires et radiées ? Elles manifestent une structuration interne précoce de la masse solide, au contraire de l’hypothèse de contraction d’une masse solide homogène.
La science des matériaux fournit des indices précieux. En effet, les métallurgistes spécialistes de la solidification des alliages métalliques observent des structures colonnaires analogues dans leurs lingots. Dans des conditions particulières de gradient thermique, l’interface entre le liquide et le solide présente des « digitations » : des doigts de solide se développent et avancent dans le liquide. Ils finissent par se souder les uns aux autres, c’est ce qui fait apparaître les orgues. La contraction thermique postérieure éventuelle de la masse solide peut suivant les cas disjoindre les prismes préalablement formés.
Le mécanisme précédent de digitation peut jouer dans le cas de la prismation des roches volcaniques : il permet d’expliquer les structures circulaires et radiées, ainsi que l’organisation en grand des coulées où les deux mécanismes (contraction/digitation) peuvent jouer, et enfin de rendre compte des caractères des orgues un peu particulières découvertes dans le terril de la Ricamarie près de Saint-Étienne, où des restes de charbon ont brûlé au sein de grès et d’argilites et formé des magmas.
Bernard Guy, Enseignant-chercheur, Mines Saint-Étienne – Institut Mines-Télécom
Cet article est republié à partir de The Conversation sous licence Creative Commons. Lire l’article original.
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