DMS Logistics optimise le transport terrestre de conteneurs
La chaîne logistique terrestre des conteneurs souffre d’une faible digitalisation qui limite l’organisation et la communication entre ses différents maillons. Pour y remédier, la start-up DMS Logistics, incubée à Mines Saint-Étienne, développe une plateforme d’optimisation de la gestion de ces flux de marchandise. Grâce des méthodes de machine learning, elle automatise la réalisation de plannings, réduit la congestion au niveau des terminaux et favorise la compétitivité des ports et de leur réseau logistique.
La capacité des ports à fluidifier les transferts de marchandises impacte leur compétitivité dans un secteur où la concurrence est rude. Or, l’une des problématiques majeures de ces infrastructures est leur congestion permanente. Elle s’explique notamment par la capacité physique de réception des camions au niveau des terminaux, mais aussi l’absence d’anticipation des échanges de conteneurs avec les transporteurs. En résultent des ralentissements coûteux et des frais de détention pour chaque retard. Au cœur du problème ? Un manque de communication entre les acteurs d’une même chaîne d’approvisionnement : terminaux, transporteurs routiers, dépôts de conteneurs, armateurs, transitaires, etc.
Dans ce cadre, la start-up DMS Logistics veut rassembler l’ensemble de ces acteurs autour d’une plateforme d’optimisation et d’anticipation des flux terrestres de conteneurs. « Il s’agit d’un marché important avec 800 millions de conteneurs échangés chaque année à travers le monde », précise l’un des trois fondateurs, Xavier Des Minières, spécialiste de la logistique terrestre. À partir des données opérationnelles de chaque acteur, la start-up aboutit à une optimisation globale d’une chaîne d’approvisionnement et non plus d’un acteur individuel. Cette solution logicielle répond ainsi aux ambitions du plan stratégique gouvernemental « France logistique 2025 » initié en 2016 pour une logistique nationale plus performante et attractive.
Digitaliser les entreprises autour du conteneur
« Le secteur de la logistique est encore peu digitalisé. Il se compose de nombreuses PME aux marges infimes qui n’ont donc pas les moyens de s’offrir un outil numérique de gestion de leurs opérations », explique Xavier Des Minières. Un premier point auquel remédie DMS Logistics en équipant numériquement ces utilisateurs, en s’adaptant à leurs moyens. Toutefois, la solution gagne en intérêt lorsqu’elle regroupe tous les maillons d’une chaîne d’approvisionnement. Pour cela, l’entreprise cible les terminaux autour desquels gravitent tous les autres acteurs terrestres.
La solution de DMS Logistics est une plateforme SaaS (Software as a Service) distribuée à travers le cloud. Elle permet aux utilisateurs d’entrer leurs données opérationnelles en ligne : mouvement de conteneur, missions à faire ou déjà réalisées, etc. Pour les acteurs déjà digitalisés, le service se connecte à leurs données par un protocole API (Application Programming Interface). Depuis sa création en 2020, la jeune pousse a ainsi collecté plus de 700 000 mouvements de conteneurs. De quoi alimenter en masse ses algorithmes de machine learning. « Nous automatisons trois actions coûteuses en temps à savoir : la gestion des plannings opérationnels, les prises de rendez-vous aux terminaux, ainsi que la communication entre les partenaires », décrit Xavier Des Minières.
Prédire les flux à partir de l’historique des données
Pourquoi ce secteur a besoin d’automatisation ? Sur le terrain, beaucoup d’acteurs réagissent aux difficultés de gestion en temps réel en échangeant par talkie-walkie ou appels téléphoniques. Ils traitent constamment des difficultés en apparence imprévues. « Cependant, nous avons démontré qu’il y a beaucoup de redondance dans les comportements opérationnels des acteurs. Les difficultés sont donc prévisibles et nos algorithmes permettent de les anticiper », explique Cyriac Azefack, docteur en intelligence artificielle et data scientist chez DMS Logistics.
La prévision est d’autant plus précise quand elle croise les données des différents acteurs. Par exemple, à partir des horaires de rendez-vous proposés par les terminaux pour récupérer les marchandises, il est possible d’optimiser les emplois du temps des chauffeurs des transporteurs. De même, les comportements de ces derniers (historique de leurs opérations, mouvements des stocks, etc.) permettent d’identifier les créneaux adéquats pour ces rendez-vous. Le transporteur accède donc au terminal quand cela lui convient et que le terminal n’est pas encombré. Une organisation à l’apparence simple qui n’était pas possible auparavant.
L’optimisation peut atteindre des degrés encore plus avancés. « Toujours, à partir des données comportementales des transporteurs, nous identifions les chauffeurs et les camions les plus adaptés à une mission (locale, longue distance, etc.) », ajoute Taki-Eddine Korabi, docteur en mathématiques, informatique, automatique et data scientist chez DMS Logistics. Au final, l’optimisation globale d’un écosystème entraîne une meilleure gestion locale.
Vers l’optimisation d’écosystèmes logistiques locaux
La solution de DMS Logistics est distribuée en Côte d’Ivoire et à Marseille où l’équipe de 12 personnes est implantée. « Après 4 mois d’exploitation de notre installation pilote, nous pouvons prédire les arrivées de camions sur un terminal avec un taux de fiabilité de 98 % sur une semaine », précise Xavier Des Minières. Pour le terminal, cela se traduit par une économie de 15 % de ses ressources. De plus, lorsqu’un port est performant, c’est l’attractivité d’un territoire tout entier qui est favorisée. Les retombées économiques sont donc multiples.
Autre résultat clé : l’optimisation des flux au niveau des terminaux favorise la transition écologique des ports. En effet, une meilleure organisation signifie moins de transports superflus, une réduction du trafic au niveau des ports, et par conséquent moins de pollution locale. La qualité de l’air en est améliorée.
Côté scientifique, la recherche ne s’intéresse à l’optimisation des activités des transporteurs de conteneur terrestre que depuis 2015 et manque encore d’informations de terrain. « Nous allons commencer une thèse Cifre avec Mines Saint-Étienne qui s’appuiera sur l’utilisation des données récoltées par notre plateforme. Cela nous permettra d’aborder cette thématique de façon optimale et d’offrir de belles perspectives pour la recherche et les métiers de la logistique », conclut Taki-Eddine Korabi.
Par Anaïs Culot
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