Claire Gérente, chercheuse à IMT Atlantique, coordonne depuis 2018 le projet de dépollution FloWat1, financé par l’ANR. Cette initiative a pour but principal le traitement complémentaire des eaux usées tertiaires issues de l’industrie agroalimentaire par des marais flottants. Les eaux usées tertiaires sont des effluents subissant une étape finale de traitement dans le processus d’épuration pour éliminer les polluants résiduels. Elles sont ensuite rejetées dans le milieu récepteur, un écosystème aquatique réceptionnant les eaux usées traitées.
Ces marais agissent comme des filtres pour les polluants particulaires et dissous. Ils peuvent s’intégrer facilement sur les systèmes de lagunages existants afin d’affiner le traitement de ces eaux. Un des objectifs de ce projet est d’améliorer les marais flottants conventionnels pour accroitre l’enlèvement du phosphore voire de le récupérer pour une réutilisation ultérieure et ainsi diminuer la pression sur cette ressource épuisable.
Dans ce cadre, des recherches sont menées sur l’utilisation d’un matériau spécifique, le béton cellulaire, pour permettre la récupération du phosphore. « Le retrait du phosphore présente un intérêt environnemental important, puisqu’il diminuerait notamment l’eutrophisation des eaux naturelles dans lesquelles se déversent les effluents traités », déclare Claire Gérente. L’eutrophisation est le processus qui se caractérise par une augmentation des concentrations d’azote et de phosphore dans l’eau, entrainant un dérèglement des écosystèmes.
Les marais flottants : une « Nature-Based Solution »
Le dispositif de marais flottant consiste à couvrir une zone d’eau, généralement une lagune, avec des plantes, en l’occurrence des carex, disposées sur un matelas flottant. Les racines, immergées, agissent comme des filtres en retenant les polluants présents dans l’eau via différentes étapes physiques, chimiques et biologiques. Ce mécanisme est appelé phytoépuration.
Les marais flottants s’inscrivent dans la lignée des Nature-Based Solutions : des dispositifs naturels, moins couteux que des technologies conventionnelles, mis en place pour répondre à des problèmes écologiques. Pour fonctionner efficacement, il faut avant tout « surveiller la bonne croissance des plantes, siège de la dépollution » souligne Claire Gérente.
Afin de répondre aux objectifs du projet, une étude à l’échelle pilote a été mise en œuvre sur un site industriel d’abattage et de transformation de viande. Des effluents agroalimentaires réels ayant subis un traitement biologique sont envoyés vers quatre lagunes pilotes dont trois équipées de marais flottants de différentes tailles et une non couverte servant de contrôle. Le site expérimental est entièrement automatisé et pilotable à distance pour faciliter la supervision.
Le suivi des performances porte sur le traitement des matières organiques, de l’azote, du phosphore et des matières en suspension. En plus des données de qualité de l’eau entrante et sortante, des paramètres physico-chimiques et des données climatiques seront suivis en continu. Le devenir des polluants dans les différents composants du système de traitement sera identifié par l’échantillonnage et l’analyse des plantes, des sédiments et du matériau permettant l’enlèvement du phosphore.
Ce marais flottant sera le premier à être facilement démantelable et recyclable, amélioré pour l’enlèvement voire la récupération du phosphore en plus de fournir un traitement pour les matières en suspension, la pollution carbonée et les nutriments.