La capture de mouvement pour la santé et le sport

, , ,

Généralement connue pour son utilisation au cinéma, la motion capture est aussi un outil de recherche. À IMT Mines Alès, des travaux sur la santé et le sport sont menés avec cette technique pour visualiser et diagnostiquer avec précision les mouvements corporels et les problèmes de santé.

Dans une salle, une personne marche avec des marqueurs accrochés à ses cuisses et à ses chevilles. Flexion, saut, pas, chaque mouvement est enregistré par des caméras disposées dans la pièce. À quelques mètres du sujet, des chercheurs observent en direct son jumeau numérique effectuant les mêmes actions sur un logiciel 3D. Leur objectif n’est pas de produire un personnage de fiction en image de synthèse, mais d’étudier la démarche de l’individu.

Cette scène se déroule à IMT Mines Alès, sur un site de la plateforme AIHM (Alès Imaging and Human Metrology), un projet interdisciplinaire dédié, entre autres, à l’étude du corps et du mouvement humain à l’aide de techniques telles que la motion capture. « Avec cette plateforme nous souhaitons notamment faire de la capture de mouvement, mais pas uniquement dans une salle dédiée comme c’est généralement le cas. Tout le système est mobile et peut être déplacé dans d’autres environnements » déclare Pierre Slangen, chercheur en imagerie à IMT Mines Alès. « Une des raisons d’être de AIHM est de caractériser les mouvements des personnes pour diagnostiquer les problèmes de santé des individus » poursuit-il. AIHM est une des plateformes de l’UMR EuroMov Digital Health in Motion, entre IMT Mines Alès et l’Université de Montpellier.

À IMT Mines Alès, une personne équipée de capteurs de mouvement effectue des gestes traduits numériquement sous la forme d’un squelette animé (écran du bas), qui fournit les données nécessaires à l’animation en direct d’un avatar 3D en réalité virtuelle.

Avec la capture de mouvement, les gestes tels que la rotation d’un bras ou le fléchissement d’une jambe peuvent être quantifiés, ce qui est impossible à l’œil nu. Il est ainsi possible d’étudier précisément les mouvements d’une personne et de les mettre en lien avec son activité cérébrale qui elle, peut être visualisée en couplant la motion capture à un électroencéphalogramme ou à de la spectroscopie infrarouge.

Industrie 4.0 et sport de haut niveau

Les chercheurs d’AIHM travaillent aussi sur les troubles musculosquelettiques dans l’industrie 4.0. Avec la motion capture, les scientifiques comptent étudier les mouvements des manutentionnaires avec précision. Dans ce cadre, l’objectif est de proposer des conseils pour optimiser les mouvements des travailleurs afin de réduire leurs problèmes de santé. Il s’agirait par exemple de voir comment une personne peut améliorer sa posture lorsqu’elle porte un colis et lorsqu’elle se déplace avec. Dans ce sens, ces études pourraient également déboucher sur des suggestions d’amélioration de l’aménagement de l’espace de travail.

La technologie présente également un intérêt dans l’analyse des mouvements des sportifs. Concernant ce domaine, le but ne serait pas seulement d’éviter les blessures mais aussi d’améliorer les performances des athlètes. « Auparavant les entraîneurs des sportifs de haut niveau étaient chargés de diagnostiquer les postures des athlètes pour les aider à améliorer leurs performances » déclare Pierre Slangen. « Aujourd’hui des outils comme la motion capture permettent d’accompagner les entraîneurs pour réaliser des analyses plus fines » poursuit le chercheur.

La motion capture « monocaméra » a d’ailleurs été utilisée à IMT Mines Alès dès 2004 pour optimiser la prothèse de course de Dominique André, sprinter paralympique médaillé. Actuellement, la capture de mouvement « multicaméras » est également appliquée dans le domaine du cyclisme mais aussi dans l’optimisation de prothèses de marche pour des utilisations quotidiennes.

Avec la motion capture, des jumeaux numériques de l’individu filmé sont produits, ce qui permet de lui montrer ce qui se passe lors de son activité. « Cette perception visuelle est très motivante car on peut montrer des amplitudes de mouvements aux sujets et aux sportifs » indique le chercheur. Il est ainsi possible de faire du renforcement psychologique. Le fait de visualiser ses mouvements sur un écran permet d’encourager les sportifs et les usagers à reproduire les gestes les mieux adaptés à la pratique de leur activité.

Un avantage interdisciplinaire

Selon Pierre Slangen « la plus-value de la plateforme AIHM est qu’elle fait intervenir des ingénieurs et des docteurs de différentes disciplines telles que l’optique, la physique et la vision par ordinateur ». Parmi ces professionnels, certains sont des experts en métrologie (la science des mesures) de leur domaine, ce qui permet d’apporter un regard critique sur les mesures réalisées lors des expériences. « Ils sont capables de qualifier et de quantifier les mesures et leur validité » pointe Pierre Slangen. De cette façon, les essais sont constamment améliorés de sorte à obtenir des résultats de plus en plus fiables.

Des marqueurs rétroréflechissants sont posés sur le bras droit d’une personne. Ils mesurent 10 mm de diamètre pour l’avant-bras, et 4 mm pour les doigts.

Les marqueurs sont détectés par une ou plusieurs caméras, et traduits sur un logiciel numérique qui réplique leur position en temps réel.

8 caméras traquent les mouvements du bras, et permettent aux chercheurs d’étudier les mouvements de la personne portant les marqueurs.

La trajectoire d’une phalange peut être représentée sous la forme de courbes indiquant ses coordonnées dans l’espace.

Le concept de la plateforme AIHM est basé sur la combinaison de différentes technologies et disciplines pour étudier un sujet (ou un objet) sous différents angles pendant le déroulement d’une activité. « L’idée est par exemple de coupler l’analyse du mouvement d’un individu grâce à la motion capture avec un électroencéphalogramme et un électromyogramme de façon synchronisée » illustre Pierre Slangen. « Avec l’électromyogramme, l’activité musculaire de l’individu est finement caractérisée tandis que les capteurs neurophysiologiques permettent de visualiser le confort de la personne d’un point de vue cérébral, et ce dans des environnements sonores et lumineux qui peuvent être contrôlés dans notre plateforme », précise-t-il.

Rendre la motion capture accessible aux praticiens

« Les équipements nécessaires à la capture de mouvement peuvent atteindre un prix allant de 60 000 euros à 100 000 euros » indique le chercheur. Ce coût financier élevé est notamment lié à la quantité de caméras en jeu et aux types de caméras utilisées. Certaines peuvent par exemple être utilisées dans un environnement hostile (sous l’eau ou en extérieur) ou à haute vitesse, ce qui suggère que leur coût est beaucoup plus élevé qu’une caméra classique pour la motion capture

Pour le domaine de la santé, Pierre Slangen souhaiterait que les dispositifs de motion capture deviennent financièrement accessibles afin que les hôpitaux, les cliniques ou les ehpad puissent s’en doter. Pour se faire , il s’agira de sélectionner les outils appropriés aux besoins des médecins. « Un kinésithérapeute n’aura pas forcément besoin d’un appareil avec une précision inférieure au millimètre » estime par exemple Pierre Slangen.

Actuellement, des thèses et des travaux d’élèves de master à IMT Mines Alès contribuent activement au rayonnement de la plateforme AIHM, en collaboration directe avec l’UMR « EuroMov Digital Health in Motion » ou d’autres départements de l’Université de Montpellier, avec pour objectif de populariser l’intérêt de cette technologie en dehors du cinéma.

Par Rémy Fauvel.

2 réponses

Trackbacks (rétroliens) & Pingbacks

  1. […] La capture de mouvement pour la santé et le sport Partager […]

  2. […] La motion capture pour la santé et le sport […]

Laisser un commentaire

Rejoindre la discussion?
N’hésitez pas à contribuer !

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *