Jacques Besson est spécialiste de la rupture, mais détrompez-vous, il est avant tout un expert en métaux ! Au Centre des Matériaux d’Evry-Courcouronnes – également Unité Mixte de Recherche du CNRS (UMR 7633) – ce chercheur observe les mécanismes de rupture des métaux, à partir desquels il développe des modèles de comportement. Grâce à la mise en équation de ces modèles, il est capable de prédire et prévenir la fissuration et la ruine de structures.
Jacques Besson a effectué son cursus d’ingénieur et sa thèse aux Mines de Paris. Dès son arrivée au CNRS en 1992, à la suite de son post-doctorat, il se dédie à l’étude de la rupture des matériaux. Fortement ancrées dans l’industrie, du pétrole et du gaz, du nucléaire ou encore de l’aéronautique, ses recherches impliquent de nombreux partenaires, comme GRT Gaz, EDF, CEA, Framatome, ONERA ou Safran. Cette proximité avec le monde industriel l’a mené deux fois hors du circuit académique français. Une première fois, en 2000, à l’occasion d’une année sabbatique passée à l’institut de recherche Hereon, ex-GKSS, en Allemagne ; une seconde, en 2004, pour un détachement d’un an à l’EDF Lab des Renardières, en Seine-et-Marne.
Ces expériences lui ont donné l’opportunité d’établir des contacts pérennes, et surtout, « de s’extraire du tumulte quotidien pour réfléchir. » Des « pauses » dont Jacques Besson a su tirer le maximum : 30 ans plus tard, il ne se lasse pas de sa thématique de recherche. « Il y a beaucoup de façon de casser, beaucoup de matériaux, et surtout, les techniques – expérimentales, de calcul, de programmation – ont énormément évolué avec le l’essor du numérique ! »
Avant la rupture, la fissure
Le scientifique étudie donc la prévention du risque de fissuration de structures, avec une application majoritairement industrielle. Ces structures travaillent généralement en élasticité, c’est-à-dire que leur déformation reste élastique donc réversible. « Sur un avion par exemple, les ailes peuvent ployer pendant le vol mais lorsque l’avion atterrit, elles reviennent à leur place initiale », image le chercheur. Néanmoins, il arrive qu’au-delà d’un seuil de contrainte, la déformation d’une pièce devienne irréversible, on parle alors de plasticité. Le risque de rupture augmente alors.
« Dans les situations accidentelles sur lesquelles je travaille, il y a essentiellement de la plasticité, et surtout, il y a des fissures dans les structures », expose Jaques Besson. Ces fissures sont d’origine diverses : elles peuvent être dues à de la corrosion ou à de la fatigue, liée à des milliers, voire des millions de cycles d’utilisation. Elles peuvent être identifiées visuellement ou grâce à des instruments. Dans les pipelines par exemple, les « pigs » ou « pistons racleurs » sont des appareils de maintenance envoyés à l’intérieur pour prendre des mesures ou faire de l’inspection, qui peuvent détecter la présence de fissures.
Le dimensionnement, entre expérimentations et calculs numériques
L’objectif de Jacques Besson est ensuite de qualifier la dangerosité de ces fissures, aussi minimes soient-elles, et leur risque de propagation en cas d’accident ou de surcharge. L’aptitude d’une structure à résister à un certain chargement extérieur est appelée dimensionnement : la vitesse de rotation au-delà de laquelle un disque de moteur d’avion explose par exemple, ou encore la pression qu’un pipeline peut supporter, par rapport à la présence d’un défaut.